C’est au crépuscule de sa journée qu’il est temps pour le soleil d’aller se coucher.
Solennellement, il revêt sa chemise de nuit étoilée, constellée d’astres scintillants et dorés, et se glisse lentement dans ses beaux draps d’horizon renversé.
Abrité sous son ciel de lit en ruban lacté, il compte les moutons qui disparaissent dans le noir, obéissant aveuglément à l’étoile du berger.
Ces gros nuages abandonneront peut-être la pluie et les petites gouttes de nuit le berceront de leurs chuchotis.
Le roi soleil s’endort alors avec délice.
Faisant place à la lune qui trône en son royaume, l’astre nocturne aux reflets monochromes.
Le soleil rejoint enfin Morphée, il s’éclipse.

Où vont ces gens qui marchent dans la nuit et semblent tout droit sortis d’un tableau de génie.
On sent l’artiste écorché devant sa toile inspirée, les couleurs sur la palette se fondent en dégradé.
Et quels grands maîtres l’ont inspiré !
La faim de l’artiste assouvie auprès de Buffet, plié en révérence devant l’œuvre de Courbet ou un soupir d’apaisement quand Soulages peint ses nuits charbonnées.
Les gens de la nuit ne croisent pas le marchand de sable, tout est question de plage horaire,
les gens du soir ont ce vague à l’âme indéfinissable, mélancolie aux couleurs de la mer.

Certains rêvent de décrocher la lune. Qu’en feraient-ils donc par Jupiter ?
Arracher son satellite à notre vieille Terre, laisserait un trou noir dans le ciel nocturne.
La conquête de l’espace ne fait pas de quartier, ce petit pas pour l’homme qui cherche un pied-à-terre,
le rêveur est dans la lune à bord de sa fusée, tandis que vue d’ici on a le nez en l’air.
Et puis elle est si changeante qu’on la dit lunatique, tantôt jeune, tantôt vieille, cela va croissant.
Au clair de la lune dans ma vision télescopique, je plonge ma plume dans le noir du firmament.

Je me souviens que la dernière fois que j’ai passé une nuit blanche c’était après une journée noire.
J’avais traversé le monde dans un rêve tout éveillé, du petit matin jusqu’au soir.
D’un coté le soleil me saluait de son bonjour, de l’autre la lune me souhaitait bonne nuit.
J’ai compris l’infortune du décalage horaire, syndrome du long voyage au bout de la nuit.

Lorsque j’observe le petit jour à travers ma jumelle
j’ai une longue vue sur le tout ciel,
je peux aller plus loin et par-delà le soleil
jusqu’à effleurer son toit Majorelle.
Je suis comme au spectacle, les yeux rivés sur ma lunette,
j’espionne le jour par le petit bout de la lorgnette.

Il est une expression qui dit « long comme un jour sans pain ».
Le soleil point entre les grains d’avoine, de blé, de lin,
le vent leur ordonne de danser, ils marchent à la baguette,
on entend presque le doux son de la flûte, quasi muette.
Moi j’aime ces jours où l’on prend le temps d’égrener les heures,
se vidant l’esprit et s’allégeant de tout labeur.
Sous la chaleur du soleil. Louant la lune et sa fraicheur.
Parcourant le jour, traversant la nuit, en apesanteur.

« Je suis un vieux mangeur d’étoiles et c’est à la nuit que je me confie le plus aisément. » – Romain Gary
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